Quelles actions concrètes pour améliorer l’engagement collaborateur ?
En une dizaine d’années, la notion d’engagement collaborateur est devenue incontournable dans les organisations. Et pour cause, selon le cabinet de conseil Gallup, les équipes les plus engagées sont 18 % plus productives, 23 % plus rentables et 81 % moins absentes que les entités désengagées. À la croisée de la satisfaction des salariés, du sentiment d’appartenance et de la performance organisationnelle, l’engagement au travail est donc un enjeu stratégique pour les entreprises.
Alors, quelles actions concrètes mettre en place pour assurer à la fois l’épanouissement des employés et leur implication au travail ? Telle est la question à laquelle se propose de répondre cet article, inspiré d’un webinaire organisé en juin 2024 par le cabinet de conseil en transformation Julhiet Sterwen et animé par Julien Lever, Managing Partner.
Dans les lignes qui suivent, vous découvrirez le retour d’expérience de Nadine Ligavant, Responsable Engagement et Expérience Collaborateur chez Natixis — Groupe BPCE. Vous seront également révélés les analyses et conseils experts de David Gautron, Partner Experience Collaborateur chez Julhiet Sterwen, et de Kevin Bourgeois, Co-fondateur et CEO de Supermood, plateforme tout-en-un dédiée à l’écoute des collaborateurs. Bonne lecture !
Du bonheur au travail à l’engagement collaborateur
Au cours de la dernière décennie, la notion d’engagement collaborateur a connu une évolution importante. Comme le souligne Kevin Bourgeois, en 2015, l’engagement au travail était un concept encore ignoré par la plupart des organisations. À cette époque, la notion de bonheur au travail, voire de bien-être au travail était maîtresse. L’engagement avait pour sa part une connotation négative. Ce concept évoquait en effet les risques psychosociaux (RPS), notamment l’épuisement professionnel par le surinvestissement, ou burn-out.
Aujourd’hui, l’engagement est appréhendé sous un angle plus positif puisqu’il est notamment considéré comme le produit d’une bonne expérience collaborateur. Une notion qui, rappelle David Gautron, est inspirée de celle d’expérience client et vise à optimiser la satisfaction des salariés à chaque étape du parcours collaborateur. Mais attention, il convient de ne pas confondre expérience employé et engagement au travail. En effet, souligne Kévin Bourgeois, un salarié peut être très heureux au travail, mais complètement désengagé. Et, au contraire, un travailleur peut être insatisfait de son emploi, mais particulièrement impliqué dans ses missions.
Finalement, explique Kévin Bourgeois, l’engagement renvoie au sentiment d’appartenance qu’un salarié peut ressentir à l’égard de son entreprise d’une part, et de son groupe et de sa profession d’autre part. Si une bonne expérience employé est susceptible de renforcer l’engagement des salariés à l’égard de leur employeur, il existe bien d’autres facteurs favorisant l’engagement collaborateur. Ainsi, dans la pratique, les structures clientes de Supermood traquent plusieurs dimensions de l’engagement. Le tout étant d’identifier les leviers permettant aux salariés de se sentir bien dans l’entreprise, d’avoir envie d’y rester et d’y être productifs.
Un niveau d’engagement collaborateur relativement stable
L’engagement collaborateur défini par Supermood comme « le fait que les collaborateurs soient productifs pour l’entreprise tout en assurant leur bien-être et leur motivation » est relativement stable au fil des années. Selon nos trois experts, la crise sanitaire a marqué une rupture passagère avant un retour à la normale.
La période de la pandémie a été marquée par un engagement extrêmement fort, au plus haut depuis une trentaine d’années. Cette phase de « sur-engagement » s’explique, selon Kevin Bourgeois, par un regain de solidarité, mais aussi par la réactivité dont ont su faire preuve les organisations. Dans le contexte pandémique, Natixis a par exemple réussi l’exploit d’équiper ses 14 000 salariés du système d’écoute interne Supermood en seulement 10 jours. De quoi prendre le pouls du personnel et piloter de manière éclairée en cette période trouble.
In fine, et contrairement à ce que laissaient présager les phénomènes de « Grande démission » et le « Quiet quitting », l’engagement ne s’est pas écroulé à l’issue de la pandémie de Covid19. L’exemple de Natixis est là encore assez représentatif de la situation des entreprises hexagonales : en 2023, la banque d’investissement enregistrait un taux d’engagement de 75 %, contre 63 % avant la crise sanitaire.
Mesure de l’engagement : le retour d’expérience de Natixis
Si le niveau d’engagement des collaborateurs est relativement linéaire sur le temps long, l’utilisation de cette métrique est pour sa part susceptible d’évoluer au fil des années, comme le montre l’exemple de Natixis.
Au cours des années 2010, relate Nadine Ligavant, la banque mesurait l’engagement de ses équipes de manière ponctuelle, au moyen d’un baromètre établi tous les deux ans. À la fin de la décennie, Natixis a souhaité mettre l’accent sur l’amélioration de l’expérience collaborateur. Dans cette perspective, l’employeur s’est doté d’un outil lui permettant de prendre régulièrement le pouls de son capital humain : la plateforme Supermood.
La crise sanitaire a été l’occasion pour Natixis d’exploiter cet outil pour mettre en place un dialogue en continu avec son personnel. Entre 2020 et 2021, l’organisation, épaulée par Supermood, a ainsi mené plus de 100 enquêtes internes. Grâce à ces sondages, Natixis a pu récolter des feedbacks précis sur lesquels la direction et le management ont pu s’appuyer pour piloter de manière éclairée dans un contexte troublé.
La fin de la pandémie a marqué un retour à une nouvelle normalité en matière de mesure de l’engagement collaborateur chez Natixis. La banque poursuit ses baromètres d’engagement et combine ces derniers avec des enquêtes pulses à la main des métiers. Ces sondages courts et fréquents sont ciblés sur une population spécifique, une étape du parcours collaborateur ou encore une thématique. Ce dispositif à deux ressorts permet à Natixis de prendre le pouls de ses équipes, d’identifier les leviers de l’engagement au travail et de mettre en place des actions précises.
Les bonnes pratiques pour mesurer l’engagement collaborateur
La trajectoire suivie par Natixis en matière de mesure de l’engagement collaborateur est exemplaire. Cependant, constate Kevin Bourgeois, toutes les organisations n’ont pas encore atteint ce niveau de maturité et beaucoup pourraient s’inspirer des bonnes pratiques mises en place par la banque et par d’autres clients de Supermood.
Certaines structures centralisent la mesure de l’engagement collaborateur afin d’informer les décisions du comex. D’autres, à l’instar de Natixis, décentralisent le suivi de l’engagement collaborateur et donnent la main aux managers. Cette stratégie est la plus impactante. Elle permet en effet d’avoir une approche très fine des problématiques rencontrées par les salariés et de leurs leviers d’engagement au travail. Un encadrant peut, par exemple, interroger les commerciaux de son équipe sur leur rapport aux clients ou sur leurs outils pour bien cerner leurs enjeux quotidiens.
En termes de fréquence, les clients de Supermood combinent en général enquête annuelle et sondages pulses afin d’atteindre une certaine finesse d’analyse et de compréhension. Comme l’illustre l’exemple de Natixis, les sondages spécifiques et réguliers permettent d’être flexible et de rebondir sur des situations spécifiques (onboarding, séminaire, situation de crise, etc.). En moyenne, les entreprises clientes de Supermood réalisent ainsi 24 sondages par an, avec un écart type très fort. Une structure comme Natixis peut en effet mener plus d’une centaine d’enquêtes sur deux ans, tandis que d’autres se contenteront d’un ou deux sondages sur la même période.
En pratique, souligne Kevin Bourgeois, le rythme idéal des enquêtes internes dépend de l’utilisation qui est faite des résultats. Il existe ainsi trois grands types d’enquêtes avec des objectifs et des fréquences distincts :
- Les enquêtes d’audit qui sont assez larges et permettent d’analyser plusieurs leviers d’engagement, par exemple la reconnaissance, une à deux fois par an ;
- Les enquêtes thermomètres qui sont courtes et organisées régulièrement pour suivre l’évolution de l’engagement et voir l’impact des actions menées ;
- Les enquêtes d’approfondissement réalisées aussi souvent que nécessaire pour creuser une problématique, par exemple la parité femmes-hommes.
En d’autres termes, pour un reporting comex, un sondage tous les 6 mois est en principe suffisant. Cependant, les directions qui souhaitent piloter en fonction de données du terrain, fournir aux managers des leviers d’action concrets et instaurer un dialogue suivi avec les collaborateurs ont intérêt à miser sur une fréquence plus élevée. Mais attention, pour éviter que les salariés soient frappés par la Survey fatigue, ou lassitude du répondant, l’utilité de chaque sondage pulse doit être évidente aux yeux de tous.
David Gautron encourage lui aussi les entreprises à embrasser la « révolution du pulse ». L’écoute en quasi-temps réel permet en effet de raccourcir le temps du passage à l’action. Ainsi, dans les faits, le niveau de déconcentration des enquêtes a beaucoup changé. La prise d’initiative est désormais entre les mains des entités locales. Les grands plans d’action sont pour leur part en consolidation et viennent après un pilote. Cette configuration tranche avec les schémas descendants observés avant le Covid. Mais attention, organiser des enquêtes régulières représente un challenge. Entre deux écoutes, il est en effet préférable d’avoir adopté des mesures et communiqué à leur propos afin d’embarquer les collaborateurs et d’éviter les frustrations. Il faut en outre bien thématiser chaque sondage, le rendre très actionnable et bien clarifier son objectif.
Les clés pour convertir l’enquête d’engagement en plan d’action
Comme le souligne Nadine Ligavant, avec les bons outils, réaliser une enquête d’engagement des collaborateurs est relativement simple. La partie la plus complexe consiste à mettre en place un véritable plan d’action afin de renforcer l’engagement des salariés.
Selon la Responsable engagement et expérience collaborateur chez Natixis pour assurer le succès d’un tel dispositif il est nécessaire de :
- Bénéficier d’un sponsorship de la part de la direction qui doit mettre l’engagement au cœur de sa stratégie et impliquer le management ;
- Partager les résultats avec les managers et les équipes, ce qui constitue déjà en soi un plan d’action puisque les collaborateurs se sentent écoutés ;
- Responsabiliser les managers, notamment pour qu’ils relaient et discutent des résultats d’enquête avec leurs équipes ;
- Prioriser les efforts en ciblant avant tout les actions à court terme, efficaces et impactantes, ou bien en adressant en priorité les principaux points de blocage ;
- Mettre en place des actions adaptées aux enjeux de chaque périmètre, métier, voire population tels que révélés par les données et verbatims collectés grâce à un logiciel d’écoute comme Supermood ;
- Communiquer en interne autour des actions mises en place afin de démontrer aux collaborateurs que leur parole a des conséquences concrètes.
Il est également utile de nommer, dans chaque périmètre, une personne dédiée à la mise en place du plan d’action et à l’accompagnement des managers (conception d’actions locales, discussions avec les équipes, etc.). Grâce à cette approche, un département de Natixis soumis à une forte dynamique de transformation a par exemple réussi à améliorer drastiquement le niveau d’engagement de ses collaborateurs, passant d’un score eNPS de -40 en 2020 à un score eNPS de +3 en 2023.
Selon David Gautron, la personnalisation de l’offre de services proposée aux collaborateurs peut aussi contribuer au succès d’un plan d’action d’engagement au travail. L’enjeu étant d’associer cette approche « sur-mesure » à un traitement égalitaire des employés permettant de respecter le pacte social de l’entreprise.
Néanmoins, comme le souligne Kévin Bourgeois, la clé pour que les enquêtes conduisent à une hausse du niveau d’engagement des collaborateurs reste que les managers s’approprient les sujets et en parlent avec leurs équipes. Dans cette perspective, il est nécessaire d’accompagner et de soutenir les supérieurs hiérarchiques. Sans cela, seul un encadrant sur trois partage et discute des résultats de sondages avec ses collaborateurs. Pour lutter contre la solitude managériale et faciliter la diffusion de bonnes pratiques entre pairs, Supermood a construit Connect, une communauté d’encadrants.
Enfin, poursuit Kévin Bourgeois, il est essentiel d’expliquer la démarche de feedback continu aux collaborateurs pour éviter de créer des frustrations. Une organisation qui réalise une enquête pulse trimestrielle aura par exemple tout intérêt à préciser aux répondants que celle-ci ne va pas nécessairement mener à des mesures concrètes dans l’immédiat, mais qu’elle sera utilisée pour informer la direction et, in fine, orienter les politiques de l’entreprise.
Conclusion : l’impact d’un bon plan d’action sur le niveau d’engagement
Supermood effectue un suivi annuel du niveau d’engagement des salariés de ses entreprises clientes. En moyenne, un an après le début de leur collaboration avec Supermood les employeurs enregistrent un taux d’engagement de 20 points supérieur au niveau initial. Certaines structures clientes parviennent même à gagner 70 points d’engagement en 2 ans, dont 50 points la première année.
Quel que soit son secteur d’activité, sa taille ou sa culture d’entreprise, toute organisation peut constater les résultats positifs de l’écoute des collaborateurs sur l’engagement de son personnel. L’essentiel étant que, comme chez Natixis :
- La direction donne l’impulsion en faisant de l’engagement collaborateur un objectif stratégique de sa politique ;
- Le rythme et la nature des enquêtes soient adaptés aux objectifs de l’entreprise, avec une alternance de sondages ciblés et plus globaux ;
- Les équipes soient responsabilisées pour qu’elles puissent s’approprier la démarche, être à l’origine d’enquêtes spécifiques et co-construire des actions ad hoc ;
- Les managers soient soutenus pour qu’ils puissent assumer leur rôle clé dans la transmission des informations et la mise en place des actions découlant des enquêtes.
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